Annonce des lauréats

Talents contemporains 12ème édition

Quatre comités d’experts ont sélectionné en février dernier les œuvres ou projets de 30 finalistes parmi les 433 candidats originaires de 36 pays. 

Le grand jury 2023, placé sous la présidence de Jean-Noël Jeanneney, était composé de :

Rosa-Maria Malet – Directrice de la Fondation Miró 1980 – 2017, membre du Conseil d’administration (Barcelone)
Constance de Monbrison – Responsable des collections Insulinde, musée du quai Branly – Jacques Chirac (Paris)
Alfred Pacquement – Conservateur général honoraire du patrimoine (Paris)
Chiara Parisi – Directrice du Centre Pompidou – Metz (Metz)
Ernest Pignon-Ernest (Artiste, Paris)
Roland Wetzel (Directeur du Musée Tingely, Bâle).

Les artistes révélés pour cette 11ème édition sont Ulysse Bordarias, Bilal Hamdad, Manon Lanjouère, Aurélien Mauplot, Ugo Schiavi et Noémi Sjöberg.
Ulysse Bordarias présente une multitude d’orages avec un grand dessin au graphite, Il pleuvait sur l’agora ; Bilal Hamdad propose Sans titre, première peinture de sa série en cours L’Horizon ; Manon Lanjouère recompose une atmosphère abyssale en présentant nos déchets sous la forme d’espèces sous-marines dans Les particules, le conte humain d’une eau qui meurt ; dans Les Possessions, Aurélien Mauplot réunit les cartes de l’ensemble des pays du monde sur Tour du monde en 80 jours de Jules Verne ; Ugo Schiavi présente Léviathan, fontaine-créature imaginée avec des objets abandonnés et multiples autres matériaux et enfin Noémi Sjöberg explore les questions du tourisme de masse avec sa boîte à musique One euro to jump now.

Nous félicitons chaleureusement les artistes et nous nous réjouissons d’accueillir prochainement leurs œuvres dans la collection.

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Les lauréats

Ulysse Bordarias

Né en 1988 à Paris (France) | Vit et travaille à Paris (France)

Ulysse Bordarias est diplômé de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris en 2014. Il pratique majoritairement la peinture et le dessin, mais travaille aussi en volume et en photographie. Il s’intéresse aux rapports entre image et poésie, au travail de composition, à l’imaginaire et à la dimension documentaire. Il a récemment exposé à la galerie Valérie Delaunay à Paris qui le représente (2021) ou à la galerie municipale Mariton à Saint-Ouen (2018).

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Il pleuvait sur l’agora, 2022. Dessin au graphite, pierre noire et fusain, 200 x 310 cm

Il pleuvait sur l’agora montre une multitude d’orages, de pluies, de tornades qui s’abattent et se déplacent sur des territoires urbains ou ruraux. La pluie tombe d’un ensemble de nuages qui survolent les terres. Des nageuses et nageurs peuplent l’image à des distances régulières et se débattent dans cet environnement hostile. À terre il y a des villes, des territoires de montagnes, de littoraux, de champs ainsi que des lacs et des mers. Le dessin met en scène toutes les étapes du cycle terrestre de l’eau : depuis l’eau marine jusqu’aux nuages, puis des nuages à la pluie quand ils dispersent l’eau sur les territoires. L’artiste rassemble ces données qu’il fait cohabiter afin de créer un espace changeant, mouvant, proche du rêve et de la remémoration. Le titre est inspiré de la version « Le Corbeau et le renard » (1968) de l’artiste belge Marcel Broodthaers sous forme de poème, elle- même inspirée de la célèbre fable de La Fontaine. Dans le dessin, l’agora est rendue présente par les quatre amphithéâtres qui font allusion à l’espace public, au débat ou encore à la construction démocratique. La dimension métaphorique de ce titre tient dans celle de la pluie comme figure des troubles qui peuvent survenir quelque part.

Bilal Hamdad

Né en 1987 à Sidi Bel Abbès (Algérie) | Vit et travaille à Paris (France)

Bilal Hamdad a commencé ses études d’art en Algérie à Sidi Bel Abbès, puis à l’Ensa de Bourges. Il rejoint ensuite les Beaux-Arts de Paris dont il est diplômé en 2018. Questionné par l’actualité, les mouvements de population, le métissage et le paysage urbain parisien, l’artiste dresse un portrait saisissant de notre société contemporaine. Bilal Hamdad a déjà remporté plusieurs prix, récemment le prix de la Société Générale et celui de la Fondation Colas. Ses œuvres figurent dans de nombreuses collections privées et publiques.

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Sans titre, 2022. Huile sur toile, 160 × 200 × 4,5 cm

Sans titre est une œuvre issue d’une série de peintures traitant du sujet sensible de l’immigration. Bilal Hamdad propose ici une réinterprétation de la toile Ophélie réalisée par John Everett Millais. L’eau y est omniprésente, tout autant que la personne représentée. L’homme endormi nous donne à voir le reflet d’une triste vérité, celle de notre société qui détourne le regard. Qu’est-il advenu à ce personnage ? Quels détails, laissés dans l’obscurité de la toile, nous aideraient à interpréter la scène picturale ? L’eau, peu à peu, grignote le gisant jusqu’à occuper le premier plan. Il baigne dans une eau stagnante, croupie. L’eau est omniprésente lors des traversées réalisées par des migrants. Elle semble dangereuse. Il ne s’agit plus ici de représenter une mer idyllique mais bien cet élément noir, sombre… Depuis son arrivée à Paris Bilal Hamdad observe le tissu urbain et métissé, qu’il considère comme un terrain fertile à la réalisation de ses peintures. Sans titre est la première peinture de la série L’Horizon en cours de réalisation.

Manon Lanjouère

Née en 1993 à Paris (France) | Vit et travaille entre Saint-Malo et Paris (France)

Après un parcours en Histoire de l’art, Manon Lanjouère est diplômée de l’école des Gobelins en photographie. Son travail, régulièrement exposé en France et à l’étranger, a été récompensé par plusieurs prix et est présent dans les collections de la MEP (Maison Européenne de la Photographie), du Cnap, du musée de l’Élysée et du musée Nicéphore Niepce. Lauréate de la résidence de création de la Fondation Tara Océan ainsi que du prix Photographie et Sciences de 1+2, ces distinctions lui permettent de créer son projet Les Particules.

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Les particules, le conte humain d’une eau qui meurt, 2022. Six tirages cyanotypes sur verre, 6 × (20 × 20 cm)

L’atmosphère abyssale de l’œuvre Les Particules, Le conte humain d’une eau qui meurt se compose de six cyanotypes sur verre augmentés d’une seconde plaque recouverte d’émulsion vinylique fluorescente évoquant les protéines bioluminescentes de certains organismes marins. L’image se veut être le fantôme de ces espèces en voie de disparition. Les Particules propose de pénétrer la surface immobile des eaux, de lever le linceul des peuples invisibles et de plonger le spectateur dans des abîmes de réflexion. Les déchets plastiques, récupérés sur les plages, permettent à l’artiste de représenter ces espèces sous-marines en adoptant une posture scientifique et documentaire, frontalement, sur fond de cyanotype. Comme l’eau que dont on s’asperge le visage, l’œuvre souhaite réveiller cette énergie de voir, transformant le regard en une action claire et facile, conduisant à une réelle prise de conscience.

Aurélien Mauplot

Né en 1983 à Vincennes (France) | Vit et travaille en Creuse (France)

Aurélien Mauplot étudie l’art et la communication à l’Université avant de coordonner une résidence d’artistes. Il déploie à présent ses propres recherches-explorations, consacrées aux ailleurs, révélant une œuvre narrative insulaire et pluridisciplinaire où se confondent réalité et imaginaire. Il expose régulièrement depuis 2014, notamment au Mamac, au Mucem et au Macval ainsi qu’à l’étranger, comme en Italie ou au Chili, et participe à de nombreuses résidences, dont Nekatonea, Dos Mares et le Musée national de Préhistoire (Les Eyzies, Dordogne).

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Les Possessions, 2014. Impressions numériques sur pages de livre, dimensions variables

Les Possessions réunit les cartes de l’ensemble des pays du monde ainsi que d’un certain nombre d’îles et d’archipels. Des lignes courbes, droites et parfois indécentes dessinent les frontières nationales et maritimes de la planète. De ces dessins éphémères aux formes rigides ressort l’idée que la carte n’est pas le territoire. Noirs et désorientés, les tracés deviennent des formes abstraites et aléatoires, des îles flottantes imprimées une par une sur les pages du Tour du Monde en 80 jours de Jules Verne. Le 24 janvier 1772, le commandant Crozet plante le drapeau français sur l’île principale d’un archipel qui porte aujourd’hui son nom, et s’exprime en ces termes : « Au nom de la France, je prends possession de cette île ; cette île s’appellera l’Île de la Possession ! ». Deux cents ans plus tard, un groupe de scientifiques en hivernage topographie l’archipel et nomme les sommets, les monts Jules Verne. Les Possessions se situent ici et là, dans le sillage d’une géographie instable.

Ugo Schiavi

Né en 1987 à Neuilly-sur-Seine (France) | Vit et travaille à Marseille (France)

Ugo Schiavi a étudié à la Villa Arson à Nice, où il développe un vocabulaire sculptural souvent ancré dans l’archéologie. Il le replace dans notre époque contemporaine et ses réalités, sous forme de récit ou de mythologie narrative. Sélectionné pour le prix Emerige (2016), nominé pour les prix SAM ou Audit Talent (2020), Ugo Schiavi voit ses œuvres présentées dans de multiples expositions en France et à l’étranger. Il y conçoit des projets d’envergure : Soulèvement à l’occasion de la Nuit Blanche 2018 ou Grafted Memory System lors de sa participation à la seizième Biennale de Lyon (2022).

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Leeviathan, 2022. Sculpture, matériaux variés, 290 × 65 × 65 cm

Plutôt qu’une fontaine jaillissante Leviathan semble être une créature qui peine à respirer, une chimère déversant de l’eau sur son corps énigmatique. Se détachant de l’esthétique des fontaines monumentales et des découvertes archéologiques, cette installation aux multiples facettes se présente comme un être vivant. Elle montre fièrement sa nature artificielle, faite d’objets abandonnés, de branchages, de reproductions de statues anciennes, de bouteilles en plastique, de câbles… tout en révélant sa genèse tourmentée : une accumulation de succès, de responsabilités, de tentatives et d’échecs. Comme de nombreux mythes cosmogoniques, les histoires d’Ugo Schiavi débutent avec l’eau. Toute forme de vie naissant au sein de cet élément, l’artiste modèle sa matière première à partir de là, en tissant des liens avec notre monde actuel, ses crises sociales et environnementales. Leviathan aborde des notions clés d’importance mondiale, tout en résonnant profondément avec le passé, le présent et l’avenir de la mer. Celle-ci témoigne de notre besoin désespéré d’imaginer un avenir différent, en incluant les monstruosités que nous avons créées.

Noémi Sjöberg

Née en 1978 à Madrid (Espagne) | Vit et travaille à Barcelone (Espagne)

Diplômée de l’École supérieure d’art d’Aix-en-Provence, Noemi Sjöberg se spécialise dans la vidéo, la photographie et l’installation. Elle interroge le quotidien, « jusqu’à ce que l’ordinaire devienne étrange, extraordinaire et irréel ». Elle expose à IFFR Rotterdam (2018), au Rooftop Films New York (2019/2022), au Centro de arte la Panera (2010) et à la Färgfabriken (2010/2022). Lauréate de l’appel à candidature Embellir Paris 2019, elle réalise l’œuvre pérenne Plongeon sous le pont du Garigliano. En 2021, lauréate de la résidence d’artiste à l’IHOI, La Réunion, elle réalise les œuvres Femme plurielle et Terre à l’horizon.

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One euro to jump now, 2021. Vidéo (4 min) dans coffret en bois, velours, miroir, 230 x 140 x 45 mm

One euro to jump now (un euro pour sauter maintenant) est un appel à une prise de conscience des effets nocifs du tourisme sur notre environnement. À Porto, sur le Pont Dom-Luis, des jeunes sautent de différentes hauteurs dans le fleuve du Douro alors qu’ils sont encerclés par une multitude de touristes. Sous le pont passent toutes sortes de véhicules qui contaminent l’eau : bateaux touristiques, de croisière, à moteur… L’œuvre, « objet vidéo », se présente dans une boîte en bois et velours rouge, comme un objet souvenir, dans laquelle défilent des images verticalement, sur le son manipulé d’une boîte à musique. Pour un euro, malgré le danger, les jeunes sont prêts à se donner en spectacle. Le fleuve Douro ressemble alors à un parc d’attractions. Un miroir à l’intérieur de la boîte reflète la vidéo. Celui-ci est brisé, car voyager de façon inconsciente, en polluant l’environnement avec des millions de vols et croisières, affecte la planète et notre espèce dans toutes ses dimensions sociales, économiques, écologiques et politiques. Le tourisme de masse n’a plus lieu d’être, le jouet est cassé.